Dès que l’on évoque le mot « football », une constellation d’images surgissent : des stades pleins à craquer, des supporters en liesse, les exploits d’équipes mythiques et les stars planétaires du ballon rond. Pourtant, au-delà de cet univers contemporain résolument mondialisé, subsiste une question historique fondamentale : où se situe le véritable « football homeland », c’est-à-dire la patrie originelle de ce sport devenu universel ? L’exploration des origines du football plonge dans un voyage fascinant à travers les siècles, les continents, et les cultures.
Bien avant que les clubs anglais ne codifient les règles modernes du sport, plusieurs civilisations pratiquaient des jeux de balle au pied, souvent à la frontière entre sacré, guerre et divertissement. Ces formes primitives du football différaient certes sur le plan des règles, du matériel, ou des objectifs, mais elles révèlent une constante universelle : la volonté humaine d’organiser des jeux autour d’une balle.
Le plus ancien ancêtre reconnu du football trouve ses origines en Chine, sous la dynastie Han (entre le IIe siècle av. J.-C. et le IIIe siècle ap. J.-C.). Nommé tsu chu, ce jeu consistait à frapper une balle en cuir remplie de plumes dans un filet de bambou de six à neuf mètres de haut, sans utiliser les mains.
Le tsu chu n’était pas seulement un jeu : il servait à l’entraînement militaire et à la démonstration d’adresse physique, comme l’ont relevé des textes historiques tels que le Baoding Ji. Cette pratique était structurée avec des règles précises, et témoignait déjà d’un souci d’équilibre entre force, technique et fair-play.
En Amérique centrale, plusieurs peuples, notamment les Mayas et les Aztèques, exerçaient un jeu de balle appelé « ōllamaliztli ». Bien que l’usage principal reposait sur les hanches et non les pieds, ce jeu possède un lien indiscutable avec la culture du football : un espace délimité, deux équipes, un objectif de marquer un point avec un ballon.
Sur un plan symbolique, ces jeux représentaient les combats cosmiques entre la lumière et l’obscurité et pouvaient parfois se conclure par des sacrifices humains. Bien éloigné des stades modernes, cet usage rituel n’en demeure pas moins une pierre angulaire de l’évolution des sports collectifs à ballon.
Du côté de l’Occident, les Romains ont adapté un jeu grec, l’episkyros, pour créer le harpastum. Décrit par plusieurs auteurs, dont Galien, ce jeu impliquait de petites équipes qui tentaient de garder le ballon dans leur moitié de terrain. C’était un jeu rugueux et rapide, qui nécessitait autant d’agilité que de force.
Le harpastum semble marquer une transition entre le jeu pour l’esprit et le sport en tant que spectacle physique. Bien qu’il ne soit pas directement à l’origine du football anglais, il en partage certaines mécaniques essentielles.
Si les racines lointaines du football s’avèrent globales, son homeland moderne, reconnu et célébré unanimement, est l’Angleterre. C’est dans ce pays que le jeu prit sa forme actuelle, encadrée par des règles codifiées, une organisation fédérale et une diffusion structurée.
Durant le Moyen Âge, les villages anglais organisaient des formes débridées de football, souvent appelées mob football. Deux équipes, parfois composées de plusieurs dizaines de personnes, s’affrontaient pour faire progresser une balle à travers champs, rues ou rivières, avec peu ou pas de règles.
Ces jeux étaient généralement associés à des festivités saisonnières comme le Mardi Gras ou la Saint-Jean. On y relevait peu de tactique mais beaucoup de violence, ce qui poussa plusieurs monarques dont Édouard II à en interdire la pratique, jugeant ces rassemblements trop chaotiques.
C’est surtout dans les colleges prestigieux comme Eton, Harrow ou Rugby, au XIXe siècle, que le football prit un tournant décisif. Chaque établissement possédait ses propres règles : certains valorisaient le jeu au pied, d’autres autorisaient la prise en main du ballon.
Ce métissage donna lieu à deux branches : le rugby et le football association. Ce dernier fut institutionnalisé en 1863 avec la création de la Football Association (FA), qui établit les 13 règles fondatrices du football moderne, interdisant notamment l’usage des mains.
À partir de la fin du XIXe siècle, le Royaume-Uni, à son apogée colonial, exporta le football dans toutes ses colonies : Inde, Afrique de l’Ouest, Amérique du Sud, et Asie du Sud-Est. Les organismes locaux de sport se mirent à adopter puis adapter les règles anglaises.
Des clubs furent fondés partout dans le monde, souvent par des communautés britanniques expatriées. Parmi eux :
Cette période marque l’externalisation du football comme identité culturelle mondiale, dont le centre de gravité se déplace progressivement de l’Europe vers une sphère globale.
Dans un sport désormais mondialisé, plusieurs pays cherchent à se réapproprier leurs contributions historiques. La FIFA a reconnu l’existence du tsu chu comme ancêtre légitime, tandis que certains chercheurs proposent des généalogies plus complexes tenant compte de chaque apport civilisationnel.
Certaines organisations, comme le FIFA World Football Museum à Zurich, s’efforcent de retracer toute l’évolution du football dans sa diversité. En retraçant les étapes et les influences multiples autour du globe, ce projet souligne que si l’Angleterre représente indiscutablement le cœur du jeu moderne, l’âme du football est, elle, plurielle.
Par cette reconnaissance, le football cesse d’être le simple produit d’un lieu précis ou d’une époque donnée, pour devenir une culture vivante et transnationale, nourrie de traditions, de règles réinventées, et d’histoires locales fortes.
En 2024, parler de « football homeland » ne revient plus seulement à circonscrire une localité géographique. Cela consiste également à comprendre que chaque nation ayant adopté et enrichi le football fait désormais partie intégrante de son foyer global. Du Brésil au Japon, de l’Égypte au Canada, chaque terrain foulé est une terre natale renouvelée du ballon rond.